
Le Bilan Carbone est une méthodologie développée par l’ADEME et Jean-Marc Jancovici au début des années 2000. Elle fait aujourd’hui référence en France, et de nombreuses entreprises et organisations (Etat, associations, collectivités, services publics, …) l’utilisent pour mesurer leur impact sur le climat.
1 – Connaître son impact sur le climat
Naturellement, un bilan carbone a d’abord pour objectif de connaître son impact sur le climat. Il permet d’avoir une vision à un instant T (en général sur une année) de ses émissions de Gaz à Effet de Serre (GES).
Le Bilan Carbone va donner des détails sur :
- le type de GES émis par l’organisation :
Source : Ministère de la Transition Écologique et Solidaire
Le profil GES peut être très différent selon le type d’organisation. Une structure ayant une consommation intense d’énergie fossile va émettre beaucoup de CO2, tandis qu’une organisation liée à l’agriculture va émettre plus de CH4 et de N2O.
Voici quelques exemples :
- Le Bilan Carbone d’une université ou d’une association va probablement montrer des émissions de CO2 plus importantes que les autres GES du fait du transport des élèves ou membres, ainsi que de la consommation énergétique des bâtiments.
- Le Bilan Carbone d’une coopérative agricole va probablement montrer des émissions de CH4 et/ou de N2O plus importantes que les autres GES du fait de l’utilisation d’engrais azotés ou de la production d’effluents d’élevage.
- La répartition de l’impact climatique dans l’organisation
Ce niveau d’analyse est extrêmement important, car il permet réellement d’avoir une vision claire de son impact carbone. Cela va conduire à prioriser le travail de réflexion sur certains maillons de l’organisation, afin d’établir sa stratégie de réduction GES (voir partie 2).
2 – Construire une stratégie de réduction pertinente
C’est bien LA raison principale de réaliser un Bilan Carbone : réduire ses émissions de Gaz à Effet de Serre.
Comme vu précédemment, le Bilan Carbone doit être la base de l’identification des leviers d’action et d’engagements sur des objectifs de réduction. Cette identification et ces objectifs nécessitent de mobiliser les experts métiers internes et/ou externes à l’organisation pour estimer les réductions d’émission GES, mais également pour assurer la faisabilité technique et économique des solutions.
Les types d’action à mettre en place au niveau de son organisation :
- Immédiates : faciles et peu onéreuses, ces actions ne réduisent généralement que peu les émissions de GES, mais peuvent permettre d’engager les parties prenantes dans la démarche.
Exemple : inciter ses employés ou membres à covoiturer ou prendre les transports en commun à l’aide d’une prime.
- Prioritaires : plus onéreuses, ces actions doivent être menées en priorité pour atteindre une performance GES significative pour l’organisation.
Exemple : changer de chaudière fioul ou gaz pour aller vers de la biomasse.
- Stratégiques : plus complexe, car cela nécessite une remise en cause du business model de l’organisation pour réduire les émissions de façon très importante.
Exemple : modifier son business model en passant de la vente de produits à de la location, en augmentant leur durée de vie et en les reconditionnant.
Des objectifs de réduction sont nécessaires pour avoir un réel engagement de la direction et des équipes, mais aussi pour suivre l’état d’avancement de la performance climat.
Ces objectifs sont à la libre appréciation de l’organisation et peuvent être définis sur différents périmètres (seulement la partie industrielle, l’ensemble de l’organisation, un produit ou événement particulier, etc…). Cependant, il est conseillé de suivre les objectifs nationaux et internationaux, qui dicteront les réglementations à venir.
Un prochain article répondra à la question suivante : pourquoi s’engager dans une démarche “Bas Carbone” ?
3 – Mesurer sa dépendance aux énergies fossiles
Un Bilan Carbone permet rapidement de constater si une organisation est fortement dépendante des énergies fossiles. C’est un point qui a son importance, en particulier pour analyser la vulnérabilité de ladite organisation.
En effet, deux problèmes majeurs se posent sur les énergies fossiles :
- Leur disponibilité
Par définition, une énergie fossile est non renouvelable, ce qui signifie que cette ressource ne sera un jour plus disponible. Des études montrent que le pic d’extraction de pétrole a déjà été dépassé il y a quelques années. Cela va entraîner une tension sur ce marché, et donc, une augmentation des prix et de possibles défauts d’approvisionnement.
- Leur coût sur le long terme
Deux facteurs vont faire évoluer le prix des énergies fossiles à la hausse :
- La raréfaction de la ressource (voir ci-dessus)
- Les politiques nationales et internationales, en particulier en France et en Europe, qui ont l’ambition de réduire leurs émissions de GES et leur consommation d’énergie fossile. Un des moyens pour arriver à ces objectifs est de taxer ces énergies sur leurs émissions de GES (la fameuse “taxe carbone” en France). Différents systèmes de taxation existent déjà (EU-ETS en Europe) et deviendront de plus en plus contraignants d’année en année (ces systèmes seront abordés dans de prochains articles).
Evolution du prix des quotas carbone EU-ETS
(source : https://sandbag.be/index.php/carbon-price-viewer/)
4 – Répondre aux attentes sociétales
Le sujet du changement climatique et de l’impact de l’Homme sur ce dernier est absolument partout dans notre société. Elle vient des politiques publiques, notamment avec les accords de Paris, la Stratégie Nationale Bas Carbone ou le New Green Deal au niveau européen, mais également de beaucoup de citoyens qui considèrent que rien n’est fait pour protéger notre environnement.
Pour contraindre certaines organisations à engager des actions en faveur du climat, l’Etat français a mis en place des réglementations, notamment pour la réalisation de Bilans Carbone.
C’est le cas du Bilan des Émissions de Gaz à Effet de Serre (BEGES), qui oblige certaines organisations de grande taille (service de l’Etat, services publics, collectivités, entreprises) à réaliser un Bilan Carbone simplifié (périmètre restreint) tous les 3 à 4 ans, ainsi qu’un plan d’action associé. Le BEGES fera l’objet d’un article dédié, notamment sur les changements méthodologiques en cours.
C’est également le cas des entreprises ayant l’obligation de publier un rapport de “Déclaration des Performances Extra-Financières” (DPEF), faisant partie intégrante du rapport RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises). Là, les organisations concernées ont l’obligation de réaliser un Bilan Carbone complet, ainsi que de proposer une stratégie de réduction de long terme.
5 – Monter en compétence sur le sujet du climat
Pour conclure et résumer les points précédents, un Bilan Carbone permet de mettre le doigt dans l’engrenage de l’impact climatique et de l’impact environnemental des activités humaines qui sont des enjeux majeurs de notre siècle.
Cela apporte aux organisations une meilleure compréhension et connaissance de leurs impacts, mais également des réglementations et des attentes sociétales. De plus, elles peuvent mieux apprécier leur vulnérabilité, notamment vis-à-vis de leur dépendance plus ou moins forte aux énergies fossiles ou à des matières premières très carbonées.
La plupart du temps, il permet aussi de mieux maîtriser les flux de son organisation ou d’identifier des faiblesses dans celle-ci, notamment sur la capacité à gérer ses données d’activité.
Enfin, il garantit surtout une base solide pour élaborer une stratégie pertinente et efficace qui permettra également de monter en compétences sur les technologies et pratiques réduisant les émissions de GES.
